"Le but de la vie n’est pas l’absence de souffrance, mais plutôt de se montrer à la hauteur de sa souffrance et de ses valeurs. En ce sens, l’idéologie du confort et de la joie véhiculée notamment par la société américaine et sa fameuse « poursuite du bonheur » est pour Frankl un leurre absolu, voire un piège : « (…) un tel système de valeurs est sans doute responsable du fait que le fardeau de la souffrance inévitable est augmenté par la souffrance de ne pas être heureux » 24 » . Dans un monde où le bonheur est représenté comme l’idéal, la souffrance est incompréhensible et les individus qui la vivent sont ainsi doublement punis. Dépasser le slogan marketing d’une vie heureuse remplie des dernières innovations à la mode pour une vie ayant du sens, en particulier dans un monde où les défis ne manquent pas (réchauffement climatique, perte de biodiversité, accroissement des inégalités, faillite des démocraties, …) devient ainsi le moyen de sauver le monde comme de nous sauver, individuellement, nous-mêmes, en servant nos contemporains, les générations futures et le vivant en général."
https://usbeketrica.com/fr/article/la...-ne-compense-en-rien-notre-souffrance
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Le troisième obstacle auquel se heurtent les couples, c’est l’ennui, conséquence du fait que les sensations fortes sont désormais la norme des relations au sein du couple. Les sensations fortes, qui impliquent un apport permanent d’expériences et de sentiments, ont été institutionnalisées par l’industrie des loisirs et la production massive d’expériences nouvelles. Au cours du XXe siècle, elles sont passées du domaine des objets à celui des sujets ou, plus précisément, du domaine des loisirs à celui des interactions personnelles. À ses débuts, la culture de la consommation se focalisait sur le plaisir que procuraient les objets nouveaux ; aujourd’hui, cette logique consumériste s’étend aux relations amoureuses qui imitent la consommation de loisirs en s’orientant toujours vers des objets nouveaux et exaltants. La culture des sensations fortes est particulièrement manifeste dans le domaine de la sexualité, conçu comme une source intarissable de nouveauté et d’excitation.
https://www.philomag.com/articles/couple-la-derniere-utopie
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La « formule du bonheur » proposée par la psychologie positive est basée sur des postulats aisément compréhensibles : le bonheur est attribué pour 90% à des facteurs individuels et psychologiques et les facteurs non-individuels (circonstances) jouent un rôle insignifiant ; il peut être acquis, ce n’est qu’une question de de volonté et de savoir-faire. L’individualisme est donc une condition éthique et culturelle préalable du bonheur, tandis que celui-ci est la justification scientifique de l’individualisme.
’auto-management émotionnel (gouvernement de soi) pousse l’individu à se croire responsable de tout ce qui lui arrive. Le but de la psychologie positive est de changer les styles cognitifs et émotionnels, c’est-à-dire la manière de rationaliser les causes de son succès et de ses échecs. L’affirmation de soi serait alors possible à travers des techniques pour former à l’espoir, pour pratiquer la gratitude et le pardon… Non seulement ces techniques ignorent l’inconscient, mais en plus elles écartent l’auto-régulation et toute tentative de jugement critique sur soi-même. Elles veulent faire du bonheur une habitude prise.
Il y a donc une nouvelle éthique du travail. Les salariés doivent apprendre à être flexibles pour s’adapter au mieux à un marché professionnel qui n’a jamais été aussi incertain. Le business de l’Happiness assure cet ordre social et sa perpétuation. Ce n’est pas un hasard si l’autonomie et la flexibilité font partie des aptitudes les plus appréciées : elles permettent la responsabilisation des salariés et un contrôle d’eux-mêmes… par eux-mêmes. La notion de culture d’entreprise a facilité ce passage à l’auto-contrôle, comme l’expliquent Illouz et Cabanas : « Ce rapport entre le salarié et son organisation » , qui jusque-là était défini par le contrat de travail – contrat qui établissait entre les parties des obligations réciproques et complémentaires -, a progressivement laissé la place à un rapport moral, basé sur la confiance et l’implication. Ce n’est somme toute qu’un autre contrat, selon lequel les intérêts de l’entreprise et ceux de ses salariés ne sont plus complémentaires mais identiques ».
Cet intérêt pour le bien-être des salariés dissimule en fait des objectifs d’accroissement de la productivité. La flexibilité est présentée comme le moyen pour les entreprises de s’adapter aux exigences du marché et aux incertitudes. Le travail est dépolitisé et psychologisé. Les notions de vocation -issue du protestantisme- et de résilience qui imprègnent la littérature du développement personnel servent désormais d’antidote aux incertitudes anxiogènes que fait naître le nouvel ordre économique et social. Elle rend légitime le transfert de la gestion de l’incertitude organisationnelle sur les employés au nom de la résilience : « La résilience permet de maintenir des hiérarchies implicites, de légitimer des idéologies dominantes et les exigences des employeurs. Quant au coût psychologique des situations professionnelles problématiques, instables, peu satisfaisantes à tous égards, les employés sont désormais invités à s’en occuper eux-mêmes ».
https://sms.hypotheses.org/18751
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